Ce poème fut écrit en 1910 par l’écrivain britannique Rudyard Kipling pour son fils John, alors âgé de 12 ans. Il essaie de répondre à une question que nous nous sommes tous posée : « être un Homme, ça veut dire quoi ? »
SI, quand autour de toi tous perdent la tête,
Toi tu peux rester libre et leur tenir tête ;
Si tu peux croire en toi quand tous doutent de toi,
Mais entendre ces doutes pour éclairer tes choix ;
Si tu sais patienter autant que nécessaire…
Si accablé de mensonges tu refuses de mentir ;
Si ébranlé par la haine tu refuses de haïr ;
Si tu sais être bon sans cesser d’être ferme ;
Si tu sais être sage sans devenir terne :Si tu sais rêver sans n’être qu’un rêveur ;
Si tu peux penser sans n’être qu’un penseur ;
Si tu sais accueillir le succès et l’échec,
Et aux deux imposteurs réserver la même fête ;
Si tu peux supporter d’entendre tes propos
Tordus par des escrocs pour mieux duper des sots ;
Si tu peux voir détruit l’ouvrage de ta vie,
Et te mettre à rebâtir avec des débris :Si tu peux amasser ce que tu as gagné,
Et le remettre en jeu sur un seul coup de dés,
Sans un soupir tout perdre et tout recommencer ;
Si tu sais maîtriser ton cœur, tes nerfs, ton corps,
Et quand ils t’ont lâché les faire servir encore,
Et quand il n’y a plus rien en toi, tenir,
Écouter la volonté seule qui crie : « Tenir ! »Si tu sais rester noble dans l’indigence ;
Si tu sais rester humble dans l’opulence ;
Si ennemi ni ami ne peut t’ébranler ;
Si pour toi chacun compte sans qu’aucun ne compte trop ;
Si dans cette vie, minute vite écoulée,
Tu fais soixante pas sur un chemin qui vaut :Alors t’appartiendront la Terre les jours les ans,
Mieux – tu mériteras le nom d’Humain, mon enfant !
Traduction de Karim Mahmoud-Vintam
pour Les Cités d’Or